Abara Scénariste : Tsutomu Nihei
Dessinateur : Tsutomu Nihei
Éditeur : Glénat
Collection : Seinen
Genre / Public : Science-Fiction / CyberPunk / Ados - Adultes
Type d'oeuvre : Manga
Nb. tomes parus : 2 (série terminée)
Date de parution : 28 Mars 2007
(source - bdthque)Les Shiro Gauna sont des créatures mutantes métamorphes qui sèment la terreur dans une cité futuriste. Partant de leur colonne vertébrale, une armure faite d'ossements indestructibles enveloppe le corps de leur propriétaire et se déploie dans toutes les directions, attaquant toutes formes de vie à proximité. Quelle est l'origine de cette monstruosité ?
Tsutomu Nihei, rien que ce nom, c'est mythique. L'auteur nous montre que même après Blame !, il est capable de faire toujours dans le même style sans jamais s'essouffler. C'est probablement le mangaka le plus cyberpunk que j'ai eu l'occasion de lire.
Côté scénario, même si certains peuvent trouver ça confus, ça reste totalement dans l'esprit cyberpunk 'd'où la confusion justement). L'histoire est assez complexe, on a droit à des personnages assez mystérieux qui ne parlent pas beaucoup (ce qui ajoute une couche supplémentaire au mystère) et des relations entre certains personnages qui sont assez floues et avec bien sûr, cet aspect cyberpunk au centre de toutes les intrigues : le rapport fusionnel entre l'humain et la machine sur un fond de fin du monde. Alors le scénario en lui-même est plus un prétexte qu'autre chose pour nous plonger dans cet univers inhospitalier à souhait. Où on suit une lutte séculaire entre deux entités plus ou moins dirigées par quelques humains ; avec une petite enquête policière d'un flic qui se fait largement dépasser par les évènements (on le serait à moins).
Côté dessins, Tsutomu Nihei est égal à lui-même. Ses dessins ont un côté intemporel assez fascinant. Le physique de ses personnages sont toujours les mêmes d'un manga à l'autre. Ici, le héros ressemble comme deux gouttes d'eau au héros de Blame! et les autres personnages ne feraient d'ailleurs pas tache dans ses autres mangas.
Cette fois-ci, l'auteur a penché sur l'action (contrairement à Blame! où on était totalement immergé dans une ambiance lente). Et l'action ici, ça décoiffe ! On a droit à des combats assez barbares avec la petite touche de gore. Ce qui est extrêmement intéressant, c'est que quasiment tout est dessiné du point de vue humain, comme si on était le témoin de cette histoire. C'est pourquoi on peut trouver l'action quelque peu confuse car les créatures qui se battent bougent à une vitesse supérieure à ce que peut voir l'humain. C'est ainsi qu'on "aperçoit" certains affrontements. C'est assez déroutant dans un premier temps, mais quand on entre dans cette volonté de faire du lecteur un "personnage témoin", ça devient très intéressant. Et puis c'est risqué de faire ce choix artistique car beaucoup de lecteurs risquent de s'y perdre et de ne pas chercher beaucoup plus loin.
Côté personnages, le lecteur garde plus ou moins ce côté "témoin" de ce qui arrive. On surprend quelques conversation qu'on ne peut comprendre réellement (car les clés et les secrets ne sont jamais révélés) et on ne connaît jamais 100% des motivations des personnages. En tout cas, une chose est sûre, avec un traitement des personnages de la sorte, on est beaucoup plus proche de la "réalité" (où justement on ne sait que des bribes sur les gens) que dans les mangas où tout est toujours expliqué très clairement.
Au final, je pense que c'est un manga assez déroutant car on n'a pas l'habitude de voir ce genre d'intrigues traitées de cette façon. En fait, Abara fait partie de ces histoires SF qu'on ne peut pas totalement comprendre mais dont on se rend compte qu'on touche à quelque chose de grand.
Et puis je présente mes remerciements à Tsutomu Nihei qui, avec Abara, nous pond une histoire intelligente dont tous les secrets ne sont pas clairement révélés. C'est assez rare d'avoir des auteurs qui prennent leurs lecteurs pour des gens capables de réfléchir, alors il faut le souligner. Il n'y a rien de plus abrutissant que de voir une histoire où tout est dit clairement (car on pense que le spectateur/lecteur est trop bête pour comprendre). Car grâce à ça, on a envie de relire cette histoire pour essayer de comprendre des choses qui auraient pu nous échapper à la première lecture.